LE FOOTBALL FEMININ, HISTOIRE D’UN ESSOR SPECTACULAIRE ET RECENT
Euro 2005, l’UEFA annonce un nouveau record d’affluence : 29'092 personnes sont présentes à Manchester pour le match Angleterre Finlande. Euro 2022 : 87’192 spectateurs ont assisté à la victoire des Lionnes anglaises peu de temps après avoir fait naitre cette discipline, il n’y a pas si longtemps que ça…
Le football est le sport le plus populaire et le plus pratiqué au monde, très peu de doutes là-dessus. Les chiffres en donnent le vertige : des stades de football pleins, des droits TV colossaux, des joueurs gagnant plus que le PIB de certains pays. Voici la puissance d’un sport qui est consommé tous les jours et dans tous les pays du monde.
Les règles sont simples, et la discipline ne nécessite que peu de matériel, se joue partout et en toute circonstance mais qui peut aussi être démesurée, parfois violente et sujette à de plus en plus de critiques dans la société. Nous ne traiterons pas de ce sujet dans cet article.
Depuis ses débuts, le football est considéré comme un sport d’hommes. Il a malheureusement encore de la peine à s’accorder au féminin. Le football féminin a moins de 100 ans et est souvent méconnu du grand public. Bien que très prometteuse dès ses débuts, cette jeune discipline a rencontré de nombreuses difficultés.
Cependant, depuis quelques années, le football féminin prend de l’ampleur en suscitant l’intérêt des sponsors et des médias. Les grandes instances du football mettent en œuvre des actions importantes pour rattraper le retard par rapport à son pendant masculin. Les fédérations, ainsi que les clubs, veulent promouvoir le développement de la discipline féminine avec des investissements plus conséquents.
Aujourd’hui, beaucoup considèrent cet aspect comme étant l’avenir du football, car la marge de progression est encore grande et attrayante à tous points de vue. Il n’est donc pas surprenant que les compétitions internationales rencontrent un succès grandissant.
UN PEU D’HISTOIRE… POUR COMPRENDRE
Le football féminin nait en Angleterre avec un premier match officiel le 9 mai 1881 à Édimbourg, durant lequel la sélection de Sa Majesté affrontait les Ecossaises. Une semaine après cet événement, une nouvelle confrontation entre ces deux équipes se dispute à Glasgow devant plus de 5’000 spectateurs. Le football féminin est lancé, et dès lors, la pratique se développe à travers le Royaume-Uni !
En 1917, lors de la Première Guerre Mondiale qui secoue l’Europe entière, des premières tentatives de matchs féminins sont organisés en France. Alors que cette guerre ravage l’ensemble du Vieux Continent, l’époque ne se prête pas à une révolution sportive et sociétale.
Pourtant, pendant les affrontements, un industriel anglais promeut le football féminin et incite les femmes à pratiquer ce sport. Alors que les jeunes hommes sont au front, il décide de mettre en avant une équipe féminine qui divertit ceux qui sont restés à l’arrière de la guerre. Les villes voisines font de même et tentent de former d’autres équipes identiques. Pour Noël 1917, l’équipe anglaise Dick Kerr Ladies organise un match de charité qui se joue devant 10'000 spectateurs et récolte des centaines de livres sterling pour soutenir les soldats partis au front.
De l’autre côté de la Manche, les Français s’activent pour rattraper leur retard et organisent ce fameux premier match de football à Paris en 1917. Très rapidement, un Championnat se mets et place et qui, dès 1920, s’ouvre aux joueuses de province. Femina sport, club parisien fondé par deux enseignantes d’éducation physique, s’impose comme la meilleure équipe en France en gagnant 11 fois le championnat sur 14 éditions (1918-1932).
Le niveau et l’essor du football féminin français deviennent comparables à ceux des Anglais. Un premier match international se dispute ainsi entre les deux meilleures équipes de France et d’Angleterre qui réunit 25'000 personnes à Manchester le 29 avril 1920.
Malgré un engouement phénoménal et des belles affluences, tant en Angleterre avec 150 équipes que dans le championnat français avec seize formations, la FA (Football Association, instance du football anglais) décide d’interdire les compétitions féminines. « On ne voit pas une jeune fille comme il faut en train de faire du football en costume de garçon, avec de gros souliers boueux, et de courir comme une folle, la figure rouge et suante, et de se bousculer avec d’autres jeunes filles plus ou moins comme il faut », vilipendait l’auteur Charles Torquet en 1918 dans La Vie féminine.
En effet, le flot d’opposants à la féminisation du ballon rond grossit et suscite un grand nombre de commentaires misogynes. Dès lors, les compétitions en France n’ont plus le même attrait et laissent place à beaucoup de discours acerbes. En 1932, le football féminin est condamné et interdit.
Il faudra attendre le début des années 70 pour que cette interdiction soit levée, soit un trou abyssal de 40 ans sans que le football féminin ne puisse grandir. L’Angleterre, la France mais aussi l’Allemagne et l’Italie reconnaissent à nouveau cette discipline. Les principales institutions européennes et mondiales (UEFA et FIFA), elles, ne mettent en place des compétitions féminines qu’en 1991.
LES ETATS-UNIS PREMIERS, L’EUROPE DEUXIEME
Le football féminin est dominé par l’équipe nationale des États-Unis, quadruple championne du monde et favorite de toutes les compétitions auxquelles elle prend part. Le continent européen est lui toujours représenté largement dans les grands événements avec un nombre important de fédérations qui accèdent aux compétitions. Lors des quarts de final de la Coupe du Monde 2019 en France, sept pays qualifiés sur huit étaient européens.
Même si les Etats-Unis présentent une équipe brillante, nous pouvons dire que depuis les années 2010, l’Europe domine le monde du football féminin en général. Il n’est pas anodin que deux des trois dernières Coupes du Monde se soient disputées en Allemagne (2011) et en France (2019).
Après avoir longtemps laissé une longueur d’avance aux nations émergentes du football masculin comme les Etats-Unis, la Chine, le Japon ou encore le Canada, qui ont remportés et collectionnés les titres ou les places d’honneur dans les Coupes du Monde féminines, les fédérations européennes rattrapent gentiment leur retard. A l’exception de l’Allemagne, grande nation du football masculin et féminin depuis toujours, les grands pays européens du ballon rond commencent à suivre le mouvement et commencent à investir dans le développement du football féminin depuis une dizaine d’années seulement,
La France lance le bal en 2010 et prend ainsi la décision avec la Fédération Française de Football d’injecter de gros moyens dans la sélection féminine. Cet acte a pour but de restaurer son image nationale du football, notamment suite au scandale (grève des joueurs et altercation entre membre de l’équipe) survenu en Afrique du Sud lors de la Coupe du Monde de football masculin de 2010.
D’autres fédérations importantes du football européen suivent le même chemin et le même raisonnement. C’est le cas notamment de l’Italie, de l’Espagne et des Pays-Bas, longtemps dominateurs chez les hommes, qui ont été incapables de se qualifier pour le Mondial en Russie en 2018 ou qui ont subi une élimination dans les premiers tours du tournoi. Tous sont poussés à faire de la place à l’équipe féminine, qui a conquis le cœur des supporters de leur pays et les budgets de leurs fédérations.
Il ne faut pas oublier l’importance des clubs qui forment et versent des salaires aux joueuses, sans qui les fédérations de football ne peuvent pas exister. La direction des grands clubs et surtout leurs propriétaires ont bien compris qu’il était important d’investir dans le football féminin. Moins coûteux que le football masculin, mais à forte rentabilité, celui-ci permet d’améliorer l’image du club. L’Olympique Lyonnais, club de Lyon, qui dépense moins de 10 millions annuels pour son équipe féminine, prouve qu’avec un petit budget, il est possible de gagner des titres européens, tout en formant une bonne partie de l’équipe de la sélection nationale.
UN ENORME POTENTIEL, QUI PASSE AUSSI PAR LES EQUIPES NATIONALES
Le football féminin est un marché en plein essor, notamment lorsque les équipes nationales y sont impliquées. Certes, le football masculin et féminin ne joue pas à armes égales : sur les 44% de la population mondiale se disant intéressés par le football, seulement 16% se passionnent pour la discipline féminine.
Pour vous donner un ordre de comparaison, le tennis féminin atteint un taux d’intérêt de 23%. Ce segment du marché actuellement bas possède un énorme potentiel de progression des recettes, essentiellement en droits de télévision et en sponsoring.
C’est aussi un complément du football masculin où les revenus colossaux actuels atteignent leurs limites. C’est un nouveau marché à conquérir, où toute progression de popularité peut engendrer énormément de revenus. Le football féminin est une discipline qui est prête à être exploitée, et de nombreux acteurs en profitent déjà.
Un article de The Consultancy Group, écrit par Fabio Lardo